Se construire c'est quoi concrètement ? (partie 1/2)
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On entend souvent parler de développement personnel ou de construction de soi. Que cachent ces mots ? La question se pose d'autant plus quand, dans un élan de lucidité, on se rend compte que l'on ne parvient pas à gérer certaines situations. La question devient extrêmement pressante cette fois, quand on se rend compte que ces situations reviennent régulièrement, que l'on se trouve confronté au même genre de personnes désagréables, que les schémas d'échecs se répètent, eux aussi toujours les mêmes.

Il arrive que la question de la construction personnelle s'impose sans prévenir, dans une impérieuse nécessité, suite à ces situations que la plupart appellent les aléas de l'existence, et dont les croyants savent qu'elles résultent d'une volonté de D.ieu de faire grandir l'homme. Il arrive donc un stade dans la vie où se construire, autrement dit évoluer, devient l'évidence même. Deux facteurs poussent à cela. D'une part, la souffrance suscitée par le trop-plein à supporter. D'autre part, le désir et aussi sans doute l'espoir d'une amélioration des souffrances ressenties.

Récemment, une certaine personne en proie aux doutes nous a envoyé un message dans lequel elle exprimait ces deux facteurs à merveille. Nous la citons : « En toute honnêteté, est-ce possible de guérir à cent pour cent d'une dépression ? ». Dans ses mots, on peut lire à la fois la lassitude de subir un état dépressif, et entre les mots on peut deviner l'envie puissante de dépasser cet état.

Alors oui, on se dit soudain: « Je ne peux plus continuer comme ça. Cette fois, je dois me prendre en mains, je dois me construire ». Et il est positif et courageux de réagir de la sorte, c'est un fait. Seulement, se construire de quelle manière ? Et pour aller où, pour atteindre quel stade ? C'est quoi, se construire ?

La construction de soi est d'abord un travail. En cela, il est forcément question d'efforts, d'échecs et de victoires bien sûr. Attardons-nous sur ces trois mots.

  • Des efforts. Ce sont toutes les démarches personnelles consenties pour progresser vers l'objectif ultime : la reconquête de soi. Le soi voilé, diminué, meurtri, n'en reste pas moins le socle qui élabore puis projette la pulsion de vie. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce qu'une personne éprouvant le besoin de se construire, éprouve dans le même temps le sentiment de subir la vie. Il n'y a donc rien d'étonnant à ce qu'une personne éprouvant le besoin de se construire, éprouve dans le même temps le fait de subit la vie. Puisque son être intime est déficient, sa pulsion de vie n'est pas projetée dans le monde avec une intensité suffisante pour se sentir exister, si bien que les pulsions de vie des autres personnes en viennent à déranger. Elles agressent, elles étouffent : comme nous l'écrivions, elle donnent la pénible impression de subir la vie. Inverser la tendance[1] demande des efforts, dont il importe d'accepter la nécessité pour espérer se construire.
  • Des échecs. Qui dit « efforts », dit « lutte ». Qui dit « lutte », dit « défaites ». Défaite face à soi-même (le découragement, le renoncement par exemple), ou défaite face aux autres. Ces défaites sont inévitables, dans la mesure où le monde en général n'attend pas que l'individu se soit construit pour ensuite s'adapter à lui. Le monde avance, le monde bouge et, dans son effort de construction, l'individu doit savoir qu'il devra dépasser non seulement les difficultés personnelles inhérentes à sa propre évolution (notamment l'assomption des défis nouveaux  amenés par sa progression), mais aussi les difficultés résultat de l'adaptation de sa nouvelle personne au monde. Un exemple classique se rapportant à l'emprise est la gestion du refus de l'emprise… par la personne sous emprise elle-même ! Supposons ainsi qu'une femme décide d'échapper aux manipulations orchestrées par son mari. Comment réagira-t-elle, quand son mari réagira lui-même à la nouvelle personne qu'elle annonce être devenue, à savoir une femme qui se respecte ? Comment réagira-t-elle quand son mari usera éventuellement d'artifices pervers, soufflant le chaud et le froid pour mieux la désorienter et la garder sous influence ? C'est pourquoi nous disons qu'une personne ne peut évoluer sans subir des heurts internes ou externes, et que ces heurts provoquent parfois la chute, l'échec. Nous le répétons, ceci est inévitable et donc normal.

  • Des victoires. Se voir évoluer est l'une des plus grandes satisfactions qui soient. Mais quand admettre qu'il y a victoire, quand être sûr qu'un stade à été franchi. Nous nous reposerons sur l'enseignement du Rambam, pour qui la techouva concernant une certaine faute est complète quand on se retrouve dans un contexte analogue à celui de la faute, que l'on aurait donc toute latitude de fauter puisque les conditions sont réunies, mais que l'on décide de ne pas fauter. De même si l'on peut dire, l'évolution est réelle le jour où, confronté à une certaine circonstance qui a toujours produit des effets négatifs, on parvient à supprimer ces effets voire seulement à les atténuer. Un employé subissant les sautes d'humeur d'un patron agressif, doit savoir qu'il a grandi le jour où il arrive à imposer son point de vue, avec sang-froid bien évidemment.

Pour terminer en prolongeant ce troisième point, notons que sur la longue route de la construction de soi, la plus petite victoire doit être scrutée et devenir la source d'une saine fierté. Ceci aide le processus à s'ancrer dans la réalité car il devient parfaitement mesurable.

Dans la suite de cet article, nous aborderons un exemple classique de construction de soi.

Notes

[1]  Entendons par là, le fait de réussir à projeté sa pulsion de vie (autrement dit sa volonté) dans le monde, tout en n'étant pas dérangé par les autres volontés individuelles mais, plutôt, en sachant en tirer partie pour composer et construire avec elles.

L'auteur, David Benkoel

Analyste, j'aide des personnes passant par diverses difficultés psycho-émotionnelles à se reconstruire.
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