Ce bref article propose d'aborder la féminité, non dans ses aspects extérieurs, mais dans son essence même. L'objectif ? Montrer en quoi la nature féminine peut combler avec finesse l'un des manques inhérents à la nature masculine, et ainsi contribuer au bonheur du couple.
Les Sages d'Israël ont enseigné que l'homme doit toujours être souple comme un roseau et pas inflexible comme un cèdre (Ta'anith 20a). Incidemment, cette recommandation révèle l'existence même des deux attitudes qu'elle rapporte. De fait, sans vouloir être caricatural, l'homme est généralement inflexible comme un cèdre et la femme souple comme le roseau. L'homme, qui impressionne tant sa femme par sa faculté à décider, à adopter une ligne de conduite rigoureuse, à résister aux vents les plus violents, a néanmoins ses limites. Et quand il atteint ses limites, il ne plie pas avec cette souplesse toute féminine[1]. Non, il ne plie pas : il se brise.
La virilité offre donc deux caractéristiques ambivalentes. La robustesse qui rassure d'ailleurs la femme, en la laissant notamment se reposer dessus, mais aussi la singulière soudaineté avec laquelle ce solide pilier qu'est l'homme peut voler en éclats. Une soudaineté qui pourra d'ailleurs amener la femme à des sentiments négatifs, de la surprise[2] au mépris, en passant par la déception.
Par fierté, qui n'est en fait qu'une fragilité voilée, le pilier avouera rarement être sur le point de s'écrouler. Il s'écroulera, souvent sans aucun signe annonciateur. C'est à ce moment précis, quand il ne sera plus qu'un tas épars et misérable, que l'homme aura besoin de sa femme. Il aura besoin d'une prouesse que seule elle peut accomplir[3] : voir la blessure sans la voir.
La même femme qui, dans son rôle de mère, assure à son enfant malgré le sang qui coule de sa blessure : « Ce n'est pas grave, mon chéri ! », est la même femme qui, dans son rôle d'épouse, assure à son mari : « Ce n'est pas grave, mon chéri ! » malgré que ce dernier soit déçu, désœuvré et pourquoi pas anéanti après un certain revers de l'existence.
Bien sûr, les mots de réconfort pourront varier. C'est pourtant la même force qui s'exprime : voir la blessure sans la voir. Alors que son mari se tient là, face à elle, en si piteux état, de par sa finesse d'esprit la femme peut voir au-delà. Elle verra par exemple les efforts qu'il a bel et bien accomplis, malgré l'échec auquel ceux-ci l'auront conduit. Elle verra également les efforts qu'il pourra encore accomplir, une fois retrouvée sa stature de pilier imposant. Elle verra enfin, et ici le verbe « voir » se confond avec le verbe « savoir », que tout ce que son mari a fait, c'est pour elle et pour leurs enfants qu'il l'a fait.
Dans cet épisode qu'il appartient au couple de savoir vivre car il fait partie de sa vie, deux principes se croisent, tout aussi intimes l'un que l'autre. De son côté, l'homme accepte la honte que lui inflige le fait de dévoiler son impuissance pour une seule raison : l'amour teinté de confiance qu'il éprouve envers sa femme. Une épouse qui surprend les larmes de son mari doit par exemple savoir que celles-ci trahissent de forts sentiments pour elle, car si tel n'était pas le cas, jamais il ne pleurerait devant elle. Quant à la femme justement, elle réalise que toute la fierté de son mari[4], ou plutôt toutes les promesses d'une fierté retrouvée, reposent entre ses mains.
Avec finesse donc, qui n'est autre qu'une souplesse mise au service de la vie, elle peut si elle le désire feindre de remarquer l'échec de son mari. Se jouant des paradoxes, elle peut encore parler de sa force, lui qui n'en a plus, elle peut encore vanter sa valeur, lui qui n'y croit plus… temporairement. Et pourquoi peut-elle faire tout cela ? Parce que sa nature le lui permet.
C'est le miracle de la féminité. Accueillir, serrer fort, avant de laisser repartir plus fort. Une expression existe pour désigner cela, si bien adaptée à la femme : donner la vie.